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Du 4 février au 4 mars 2023 : Julie-Ode Vérin et Morgan Bodart en résidence

Publié dans : Résidence

La Labomedia accompagne deux artistes régionales dans la naissance d’un projet audio-visuel collectif et engagé. L’intention de cette accueil est de stimuler une émulation créative et prospective en lien avec les activités connexes de l’association (écologie, féminisme, fiction et multimédia).

Nature de la résidence :

Il nous a semblé opportun de réunir ces deux jeunes artistes, toutes deux engagées dans les mouvements écologistes et/ou féministes, œuvrant dans le champ de l’audio-visuel et ayant une appétence particulière pour la spéculation narrative et la création de dispositifs low-tech, afin de susciter la création d’univers utopiques propres à questionner notre rapport à notre environnement (écologique, social et intime).

Dans le contexte de cette résidence, Julie Ode-Vérin et Morgan Bodart collaboreront, via des méthodes et outils expérimentaux à créer, à la composition d’un imaginaire prospectif éco*transféministe, une « utopie radicale ». Par le recours à l’écriture collective, au collage sous toutes ses formes, à la narration, la lecture et la création d’environnement visuels et sonores, elles entendent tisser une performance audio-visuelle à la conjonction de leurs deux univers respectifs.

LES DIALOGUES X1000
Série de vidéos et performances
En collaboration avec Quentin Aurat

Étapes du projet :

Les artistes seront accueillies sur le site et accompagnées pendant toute la durée de la résidence. Elles jouiront de toutes les possibilités matérielles, techniques et de compétences offertes par La Labomedia. Elles organiseront leur temps de recherche, de partage et de production en autonomie.

Durant la durée de la résidence, les artistes auront la possibilité d’inviter ou d’aller à la rencontre de professionnel·les susceptibles de les aider dans le développement de leur recherche ou leur production artistique.

La fin de la période de résidence donnera lieu à une restitution ouverte au public où il s’agira de présenter un état des lieux du projet initié. Une performance est envisagée. Les artistes auront la possibilité de réaliser un accrochage de leurs travaux (dont recherches) pour présentation publique et élaboreront une micro-édition papier qui leur permettra de documenter et diffuser le projet, sur le modèle du fanzine.

Description du projet artistique :

Au sein de cette résidence, la question de la transition écologique sera étudiée à travers le spectre de «L’utopie radicale» et la création de récits science-fictionnels dont les recherches de transcriptions visuelles s’axeront autour de formes expérimentales et trans-disciplinaires alliant écritures, corps, vidéo, performance, voix, techniques low-fi/low-tech et numériques.

«L’utopie radicale» d’Alice Carabédian est un essai de 2022 qui interroge le terme d’utopie comme positionnement engagé de nos imaginaires. Partant du constat d’une situation environnementale et politique réelle, la plupart des récits d’anticipation et de science-fiction connus du grand public sont très majoritairement dystopiques. Les figures littéraires du héros voir super-héros, les affrontements manichéens des intrigues, les catastrophes en cascade, nous soumettent souvent à une critique du pire dépliant des mondes non-exemplaires anxiogènes. Non que ces critiques ne soient pas nécessaires à une lecture des déviances technocratiques possibles, elles ne permettent pas non plus de dépasser des scénari apocalyptiques aux accents intrinsèquement patriarcaux et moralistes. Et est-ce un tort de penser que ces représentations alimentent aujourd’hui nos façons d’appréhender concrètement, dans les actes, des situations auxquelles nous avons et aurons prochainement à faire face aux vues du contexte climatique et géo-politique actuel ?

«L’utopie est à la fois ici et ailleurs, dans la boue et dans les étoiles. Elle est quantique.
Elle est d’une certaine façon queer, déviante et déviation, pratique et tactique féministe bien plus qu’identité. Queer est une insulte. L’utopie l’embrasse

Il nous apparaît donc nécessaire et urgent, dans nos engagements d’artistes, de nous réapproprier nos imaginaires et de créer de nouveaux récits spéculatifs, volontairement « utopiques », qui nous permettront d’entrevoir des horizons multiples et en mouvement, voyageant au-delà de ces catastrophes annoncées, jugements, identités figées et visions anthropocentriques, trop présents dans nos représentations mentales.
N’ayant pas pour but de créer concrètement un monde meilleur, mais plutôt une pensée ouverte et complexe, ils embrasseront le doute de nos devenirs avec sérénité et résilience et s’attacheront à explorer de nouvelles formes d’écritures imaginaires formelles.

En nous appuyant sur d’autres références telles que Vinciane Despret, Lynn Margulis, Donna Haraway et des auteur.ice.s de science-fiction féministes et queers, nous chercherons à explorer des mondes glissants, non genrés, désanthropocentrés, fragmentés afin d’inventer de nouveaux rapports de langage inter-espèces, de temps, d’espace et de représentations. L’utopie évoluera dans un processus perpétuel, sans finalité, surfant dans le trouble et l’incertitude (dans la forme comme dans le fond), mais ceci avec une confiance renouvelée et une vision élargie de notre rapport à tous les règnes vivants. Elle se construira dans la complémentarité d’espèces inconnues, dans des mutations entre roches et bactéries, bactéries et animaux, virus et végétaux, humains et minéraux (…)  et s’attachera à repousser les frontières de l’inimaginable.

«Même si, par bonheur ou par magie, l’utopie radicale, cette chose incongrue et impossible, venait à se réaliser, le geste «radical» de cette utopie serait justement de recréer un gouffre, une faille, un biais, de ne pas s’arrêter dans son élan et de rejouer, encore et sans cesse, cette action d’ouverture, de remise en cause, de remise en mouvement et en perspective. Bref, l’utopie radicale réalisée devrait continuer à créer des utopies radicales, à raconter des histoires et veiller à ne jamais s’ossifier, à ne jamais se transformer en point final, à ne jamais «être» mais toujours «devenir». Voilà comment l’utopie radicale n’est pas «la poursuite de demain».